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S’il te plaît, dessine-moi un travail 

Publié le : jeudi 13 avril 2017

Je m’appelle Jules et j’ai 12 ans.

Chaque matin, quand je me réveille, la première chose que je fais, c’est de regarder par la fenêtre de ma chambre pour apercevoir la couleur du ciel, pour savoir si mes parents passeront une bonne journée.

Mes parents, ils sont agriculteurs ; même si je ne comprends pas tout des histoires des grands, je vois bien qu’ils travaillent beaucoup, qu’ils sont fatigués le soir en rentrant à la ferme et qu’on ne part jamais en vacances et ils se plaignent de ne pas avoir assez d’argent à la fin du mois pour tout payer.

Quand je réfléchis à leur vie, je me dis que travailler autant, ne pas pouvoir partir en vacances et coincer sur les fins de mois, c’est injuste.

J’ai un copain, ses parents sont enseignants à l’école où je vais. Ils ne sont pas très riches mais eux, au moins, ils ont des vacances.

Pourquoi tout le monde n’a pas la même vie, les mêmes vacances, la même quantité d’argent à dépenser ?

Les enseignants, on en a besoin pour apprendre, les agriculteurs on en a besoin pour se nourrir, pour entretenir les champs et les forêts.

Alors pourquoi ils n’ont pas les mêmes vacances et les mêmes revenus puisqu’ils sont autant utiles au pays les uns que les autres ?

Quand j’en parle avec mon père, il me dit « c’est la vie Fiston. C’est comme ça. J’ai choisi ce métier. Si j’avais fait d’autres études, je serais peut-être enseignant moi-aussi aujourd’hui et on irait en vacances ».

Et je sentais dans la voix de mon père comme un sentiment de regret de tant travailler pour si peu gagner et surtout de ne pas pouvoir nous offrir tout ce qu’il aimerait nous offrir.

Mais si tous les papas avaient fait des études pour devenir enseignants, il y en aurait beaucoup trop et donc certains n’auraient pas de travail et donc gagneraient rien.

Ils auraient donc fait des études pour rien.

Et puis si tous les papas avaient fait des études pour devenir enseignants, qui s’occuperait de la terre, des cultures, d’élever des animaux pour nourrir les hommes ?

Il faut donc bien que tout le monde ne fasse pas les mêmes études ni le même métier.

Notre voisin qui habite en face de la ferme ne travaille pas ; il ne trouve pas de travail parce qu’il a mal au dos depuis des années à force d’avoir trop soulevé des sacs de ciment. Il n’a pas été beaucoup à l’école et il ne trouve pas grand monde pour l’embaucher.

J’ai de la peine pour notre voisin car je me suis rendu compte qu’il ne regarde jamais le ciel, lui, le matin quand il se lève ; car le temps est indifférent pour lui ; car il ne sort presque pas puisqu’il n’a pas à aller travailler.

Et puis mon père, le matin, quand il part tôt, les animaux l’attendent pour manger. Il est important pour ses animaux, pour ses cultures. Sans lui, ils mourraient.

J’ai demandé à mon voisin l’autre jour pour qui il était important dans la vie et il m’a répondu : « je ne sais pas petit, pourquoi tu me poses cette question ? »

J’ai été tellement triste de savoir que mon voisin n’était pas important de manière évidente pour quelqu’un ou quelque chose.

Il m’amuse quand il me dit en rigolant, mettant sa main sur son dos douloureux: «  Le travail, j’en ai plein le dos ».

Alors moi, quand je pense à tout ça, je me demande quel travail  je ferai demain et quelles études je dois faire.

Maçon, agriculteur, instituteur ? Les 3 sont essentiels à notre vie ; le premier construit notre maison, le second nourrit les hommes et le troisième nous apprend à lire, écrire et à apprendre à nous faire nos propres opinions.

Parce que c’est le métier de mon papa, je me dis que le plus important est l’agriculteur. Parce que sans nourriture, on ne peut pas vivre alors qu’on peut vivre sans maison et sans études.

Et pourtant, mon papa travaille énormément, ne prend pas de vacances et il dit qu’il a du mal à boucler les fins de mois.

Alors je réfléchis souvent à tout ça et je ne trouve pas de réponse.

J’en ai parlé à mon papa l’autre soir et voilà ce qu’il m’a répondu « Le travail fiston c’est essentiel dans la vie car ça te rend libre et indépendant des autres. »  Et il a rajouté une phrase qu’il avait lu un jour dans un livre «  Autour de la paresse tout est mort, autour du travail tout est vivant ».

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